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Saint-Valentin : mignonne, allons voir d’où vient la rose…

bouquet de roses

Pour la Saint-Valentin, environ 1,5 millions de fleurs  seront offertes en France,  dont 63% de roses. Mais en février, les roses ne poussent pas en métropole… alors d’où viennent-elles et dans quelles conditions sont-elles produites ?

Lorsque vous allez offrir ou recevoir un bouquet de roses, celui-ci aura déjà effectué un long périple. Avant d’arriver chez le fleuriste, il sera probablement passé par Aalsmeer, comme les 12 milliards de fleurs vendues chaque année dans ce gigantesque marché aux fleurs hollandais. Produites en Afrique ou en Amérique de Sud, les roses auront voyagé en camion réfrigéré avant de prendre un avion cargo qui les mènera jusqu’en Hollande. Puis elles repartiront en camion jusqu’à destination. Tout cela en un minimum de temps : en moyenne une vingtaine de jours entre la cueillette sur tige et la fin ultime à la poubelle.

 Où et comment les roses sont-elles cultivées ?

Aux Pays Bas, la plus grande entreprise comporte 200 000 m² de serres, 160 000 roses y sont produites par jour. Les roses sont toutes identiques, clonées, à température constante de 20 °C, éclairées 20 h/24 pour améliorer la photosynthèse. La serre consomme à elle seule autant d’électricité qu’une ville de 30 mille habitants telle que Lens. Les rosiers poussent hors sol, alimentés au goutte à goutte, traités contre les bactéries et parasites. Il faut compter six semaines pour que la fleur arrive au stade de la cueillette.

Depuis les années 1980, la culture de la rose s’est délocalisée vers l’Afrique (Ethiopie, Kenya, Ouganda) ou en Amérique latine (Colombie et Equateur), grâce à leur climat ensoleillé et humide ainsi qu’à la main-d’oeuvre à moindre coût. Le soleil y brille douze heures par jour et l’eau des lacs est gratuite. C’est une aubaine puisqu’une rose est constituée d’eau à plus de 75 %. Il s’agit d’une véritable industrie horticole, les fermes ne produisent dans leur majorité que des roses. Les serres ultramodernes visent environ 6 à 7 floraisons par an pour chaque rosier, avec une récolte de 3 tiges par floraison et par plant, en moyenne. Ainsi, cette production de masse, standardisée, permet-elle d’atteindre, pour certaines variétés, 1 400 000 tiges par hectare et par an ! Les rosiers ne se développent pas dans de la terre ordinaire mais sur de la roche volcanique disposée sur des feuilles de polyéthylène. L’arrosage est assuré par un système d’irrigation au goutte à goutte qui apporte nutriments et traitements divers. Malgré tous les soins spécialisés dont elle est l’objet, la rose est sensible à un grand nombre de maladies. Non traitées, ces maladies peuvent nuire à la qualité de la fleur.

Si les fleurs sont bichonnées, il en va tout autrement des salariés. Les employés de ces fermes sont majoritairement des femmes qui n’ont pas d’autre possibilité de travail.

Impact environnemental

Le bilan environnemental est préoccupant. Durant la culture des fleurs, l’environnement est pollué par les engrais synthétiques et surtout les pesticides utilisés, qui nuisent gravement à la santé des travailleurs. Ces pesticides sont bien souvent plus puissants et plus toxiques que ceux utilisés en Europe – certains sont même interdits en UE. Ces produits sont pulvérisés deux fois par semaine. Une demi-heure après le traitement, tout le monde est prié de reprendre le travail… et il n’y a pas toujours de quoi se protéger (manque de gants, chaussures fermées, vêtements de travail, etc.). Beaucoup de travailleurs souffrent de façon chronique de différentes pathologies.

Au Kenya, l’essentiel de l’industrie horticole est concentré dans la région du lac Naivasha, l’un des rares à renfermer de l’eau douce. En Ethiopie, c’est le lac Ziway qui est impacté. Les eaux résiduelles, peu ou pas traitées, y sont directement reversées. Les pesticides et les engrais se retrouvent dans les lacs. Conséquences : une multiplication des algues et apparition de la jacinthe d’eau à cause des nitrates, mort de nombreux poissons aux abords des fermes rosicoles et baignade interdite. Le tilapia, poisson servant à nourrir les riverains a complètement disparu.

Qu’en est-il des roses elles-mêmes ? Un laboratoire hollandais a analysé plusieurs bouquets de roses de provenances diverses. Bilan : une quarantaine de substances chimiques différentes dans un seul bouquet, dont 5 interdites d’utilisation en UE. Contrairement aux denrées alimentaires, les fleurs ne subissent pas de contrôles, la législation ne protège ni les consommateurs ni les travailleurs.

Quelles alternatives ?

Des horticulteurs français cherchent à relever le défi de la rosiculture bio, avec l’aide d’insectes auxiliaires ou en arrosant par le haut pour chasser les thrips qui mangent les boutons. Certes, les pétales peuvent être un peu tachés et les fleurs moins homogènes, mais elles sont odorantes contrairement aux roses industrielles et on peut les sentir sans risque.

Il reste à créer un réseau de distribution sans passer par le marché de gros. Si les fleuristes indiquent la provenance des fleurs, beaucoup de consommateurs seront prêts à payer un peu plus cher pour avoir un parfum qu’on ne trouve pas dans les fleurs d’importation.

Quant à la Saint-Valentin, il est possible de diversifier avec des bouquets d’anémones, renoncules, giroflées, roses de Noël, etc. essences locales et de saison.